Grossesse : quand les contes de fées nous gâchent la vie

On m’a toujours raconté que ma grand-mère a « adoré être enceinte ». Une chance pour elle, car elle l’a été 4 fois. De mon point de vue, les femmes qui aiment être enceinte sont une légende magnifique à laquelle je crois volontiers. Celles-ci ne se reconnaitront que partiellement, voir pas du tout dans cet article !

Moi, j’ai détesté être enceinte !

Bien sûr, ce n’est pas « être enceinte » que j’ai mal vécu, c’était une grossesse longtemps désirée. Puis, il y a eu des choses merveilleuses comme : la sensation d’une vie qui se met en mouvement, une relation qui se crée avant même de se rencontrer en face à face, des émotions qui se découvrent pour la première fois. Il m’a fallu du temps pour voir ces belles choses parce qu’elles étaient masquées par un écran de fumée !

Cet écran de fumée ce sont les contes de fées qui nous poussent à appréhender la maternité comme une seule histoire normalisée, la même pour toutes, avec ses principes, ses codes, ses chiffres, ses critères esthétiques…

Une prise de poids spectaculaire

Dès le début de ma grossesse, j’ai commencé à prendre beaucoup de poids, 1 kg par semaine. Rapidement donc, la balance s’est emballée. Il a fallu du temps (trop!) pour que mon obstétricien s’en inquiète et comme il s’agissait de ma première grossesse je ne savais pas ce qui était normal ou pas. Je mangeais comme avant, sans excès. Je faisais du sport, sans excès.

Arrivée à 20 semaines, j’étais passée de 56 kg à plus de 76 kg ! Là, j’ai tiré la sonnette d’alarme. J’ai vu une nutritionniste. Puis, à 24 semaines, j’ai reçu le diagnostic de diabète de grossesse. Pourtant je ne correspondais pas au profil des personnes à risques. J’ai entamé un régime strict, sans sucre.

À 30 semaines, les médecins ont observé que mon taux de glycémie restait anormal au réveil. Encore une fois, mon corps faisait un pied de nez aux statistiques : « vous n’avez que 2 % de risque d’avoir recourt aux injections d’insuline ». Bingo ! C’est environ 3 semaines avant mon accouchement que nous avons trouvé le bon dosage d’insuline. À la fin de ma grossesse, malgré un régime strict je pesais 90 kg. J’avais pris 34 kg !

Nous sommes d’accord qu’aucun conte de fées n’a jamais parlé de ça !?!

Bye bye conte de fées

Avant d’être enceinte, on sait qu’il n’y a « rien de plus beau qu’une femme enceinte », qu’on peut « manger ce qu’on veut » et qu’avec un minimum d’effort après l’accouchement « on retrouve son corps d’avant ». Mais ça, ce n’est pas mon histoire. Je ne retrouverais jamais le corps d’avant, même si j’ai perdu 14 kg en sortant de la maternité, et que 9 mois après je suis retombée à 61 kg. Mon corps à moi se souviendra toujours qu’il n’a pas vécu le conte de fées annoncé.

Ma grossesse « atypique » c’était aussi le regard des autres, pris dans ces légendes des grossesses parfaites. Ces regards-là m’ont écrasée, démolis certains jours, ils ont dérangé durablement l’image que j’avais de moi. J’entends encore mes proches me dire « Marie attend des jumeaux et elle a pris moins de poids que toi », ou « c’est vrai que tu es moins jolie qu’avant », « tu vas beaucoup souffrir à l’accouchement si tu es trop grosse », « tu ne te rends pas compte de la gravité d’avoir du diabète, fais attention »… Dévalorisation, honte, culpabilité, voilà quelques émotions qui m’ont été imposées avec force et violence.

Les statistiques avaient joué contre moi et la grossesse de rêve m’avait échappée en même temps que je regardais dans le miroir cette personne que je ne reconnaissais pas. Voilà pourquoi j’ai détesté être enceinte.

Accepter sa propre histoire

Il m’a fallu du temps pour faire le deuil de ce conte de fées que je n’ai pas connu. Je jalousais secrètement les autres mamans toutes fines avec leur marmot de 3 mois, celles enceintes avec leur belle bedaine bien haute. Ridicule vous dites? Exact, simplement parce qu’il n’existe aucune histoire typique ! Être enceinte c’est apprendre, accepter et changer, un peu, beaucoup, pas du tout, qu’on soit prête ou non.

Il n’existe aucune histoire typique, il faut accueillir la nôtre avec ce qu’on peut contrôler et ce qui ne se contrôle pas. Je n’avais pas le contrôle sur les hormones qui ont empêché mon pancréas de générer l’insuline permettant au corps de traiter le sucre. Je n’avais pas le contrôle sur mon entourage et les mots durs que j’ai du supporter. Je n’avais pas le contrôle sur mon corps qui change nécessairement puisqu’il prépare une vie. Mais j’ai le pouvoir d’accepter mon histoire.

Parce que c’est MON histoire, pas un conte de fées ! Et cette histoire-là, c’est le début d’une autre, incroyable, avec mon fils. Voilà pourquoi je serais heureuse d’être enceinte, encore et encore.   

2 réflexions sur “Grossesse : quand les contes de fées nous gâchent la vie

  1. Brigitte dit :

    Je viens de lire ton article , chapeau pour le recul , la distance que tu prends avec ta grande clareté vis à vis de ton vécu avec toutes tes émotions et ressentis pendant ta grossesse.

    J’aime

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