Avis au parent lecteur : j’adapte à ma façon un conte très ancien dont la première version, probablement créée au XIe siècle, fut perdue. Pourtant, il refit surface autour du XIVe siècle et devint une chanson de geste rattachée au cycle carolingien.
Il était une fois, lorsque l’Europe était encore gouvernée par les animaux, les forêts et la magie, deux frères jumeaux qui furent séparés à cause d’une trahison.
Leur mère Bellissant, sœur du roi de France Pépin le bossu, avait épousé l’empereur de Constantinople, Alexandre. À la cour se jouaient bien des complots et pauvre Bellissant en devint la victime. Accusée à tort de tromperie, elle fut chassée hors de l’empire tandis qu’elle était enceinte. Accompagnée de son écuyer Blandimain, elle se mit en route, pour rejoindre son frère au Royaume de France.
En pénétrant dans la forêt d’Orléans, Bellissant senti que l’heure de donner naissance allait bientôt arriver. Elle demanda à Blandimain d’aller chercher de l’aide. Il la déposa à l’abri sous un arbre et s’en alla promptement. Il marcha autant qu’il put, mais la forêt demeurait vide de toute voix humaine.
Bellissant, livrée à elle même, mit au monde deux garçons, des jumeaux. Mais au même moment, surgit une ourse gigantesque qui s’empara d’un des deux bébés. Réunissant les quelques forces qu’il lui restait, l’impératrice déchue se lança à sa poursuite, laissant l’autre enfant sous l’arbre.
De l’autre côté de la forêt, le roi Pépin marchait vers Constantinople, escorté par les nobles et les chevaliers de la cour de France. Il n’avait pas encore eu vent des terribles évènements qui s’étaient produits là-bas. C’est ainsi qu’ils arrivèrent au pied de l’arbre où ils découvrirent le nouveau-né laissé par Bellissant.
Pépin pensant que le petit était abandonné demanda à un chevalier de l’emmener à Orléans pour lui trouver une nourrice et lui apporter les meilleurs soins qu’un roi puisse offrir à un enfant. Ce fut fait et le bébé fut nommé Valentin.
Pépin continua sa route et rencontra l’écuyer Blandimain qu’il reconnut. Celui-ci lui raconta ce qui s’était passé à Constantinople, la colère d’Alexandre et l’exil de Bellissant. Le roi comprenant que sa sœur avait trahi son mari entra dans une fureur terrible contre elle. Il n’écouta pas l’écuyer jusqu’au bout, et décida de rebrousser chemin pour rentrer à Paris.
Blandimain revint à l’arbre où il avait laissé Bellissant, mais n’y trouva personne. Il la chercha encore et encore, jusqu’à la découvrir allongée sur le sol, en proie au plus terrible désespoir. Elle lui raconta sa course pour rattraper l’ourse qui avait pris un de ses deux enfants, que l’horrible bête avait disparu sans qu’elle ne parvienne à reprendre son petit et qu’elle avait laissé le second bébé sous l’arbre. Blandimain, désolé, lui dit qu’il revenait de l’arbre et qu’il n’y avait plus personne ici. Il la conduisit à cet endroit et ne trouvant pas son autre enfant, Bellissant fut inconsolable. Elle décida de fuir dans un pays étranger, loin de la colère de son frère et de son époux.
De son côté, l’ourse éleva le petit avec les siens. Il devint un jeune homme velu, sauvage et doté d’une force extraordinaire. Terrorisant les villageois alentour, il fut surnommé Orson le sauvage.
Et si vous voulez savoir comment Valentin et Orson furent réunis, il faudra lire le chapitre suivant.